Comment Motiver Des Étudiant.e.s Ingénieur.e.s À La Transition Écologique Du Numérique ?
La collection numĂ©rique #29 de l’AMUE - page 59
Mettre de la joie et donner envie
Les sujets de transitions sont indispensables et inscrits dans la loi RĂ©duire l’Empreinte Environnementale du NumĂ©rique (REEN). Pour des raisons de limites planĂ©taires bien sĂ»r, cependant on oublie parfois de tirer sur un des meilleurs leviers : l’apport de bĂ©nĂ©fices plus ou moins immĂ©diats. Nous devons apprendre Ă aborder le numĂ©rique responsable comme on aborde nos dĂ©placements Ă vĂ©lo : ils sont plus courts, plus efficaces, on Ă©vite les embouteillages, le stationnement et les frais d’essence, bon pour la santĂ©… en oubliant presque l’impact carbone rĂ©duit.
Chercher Ă rĂ©duire les impacts environnementaux et sociĂ©taux de nos usages numĂ©riques, ce sont de beaux dĂ©fis intellectuels. Cela devrait permettre de combattre le “bore out” presque gĂ©nĂ©ralisĂ© des consultants en transformation digitale. Il nous semble essentiel de rappeler, Ă l’encontre de tous les discours rĂ©pandues sur “l’Ă©cologie punitive”, que la transition est Ă©galement souvent Ă l’initiative de rencontres sincères et apporteuses de joie – Ă©motion souvent oubliĂ©e voire interdite dans nos milieux d’ingĂ©nieurs mais incontournable pour tenir comme nous le disent si bien Alain Damasio (“Les furtifs”), Flore Vasseur (“Bigger than us”), Camille Etienne (“Pour un soulèvement Ă©cologique”) ou Nicolas Framont (“La guerre des mots”). La gĂ©nĂ©ration actuelle d’étudiant.e.s exige de donner du sens Ă son travail, donnons-leur du grain Ă moudre.
Pédagogie fresques – prendre de la hauteur sur la technique
Comment sortir le nez des étudiant.e.s de leurs claviers ? La Fresque du Numérique est idéale pour faire de la cohésion de groupe, cet atelier de 3 heures a plusieurs points forts : ce sont les étudiant.es qui sont acteur.rices de l’élaboration des savoirs. On arrive sans trop d’efforts à embarquer presque toute la classe. L’atelier pioche aussi dans les meilleures sources techniques comme Ecoinfo tout en mélangeant les enjeux sociaux et éthiques pour prendre de la hauteur sur la place du numérique dans nos vies. Le plus difficile pour ces élèves ayant suivi un cursus scientifique depuis près de 10 ans : questionner ce que l’on crée, plutôt que de creuser en profondeur, telle une taupe en colère, dans le dernier algorithme de reconnaissance faciale. Pour poursuivre la réflexion sur le questionnement des normes nous recommandons également, l’atelier 2Tonnes, et sa dernière évolution basée sur la théorie économique du Donuts, ou la Fresque des Nouveaux Récits, basée sur les sciences sociales.
Semaine sanctuarisée
Pour embarquer le plus grand nombre sur ces sujets, Antoine, co-responsable de la majeure Data Engineering, sanctuarise une semaine entière sur l’éthique, le droit et les impacts environnementaux. Les étudiant.es n’ont pas la distraction de faire autre chose durant les cours cette semaine-là : pas de rendus ou de partiels attendus dans les autres matières. Le mot d’ordre : se donner le temps (de penser, de prendre du recul) et montrer que ce n’est pas un cours “de plus”. C’est un des plus importants défis de leur futur vie professionnelle (et personnelle) !
Débat - l’art de ne pas se battre
Après 6 heures de rĂ©flexions sur l’écoconception basĂ©es sur le RĂ©fĂ©rentiel gĂ©nĂ©ral d’Ă©coconception de services numĂ©riques (RGESN), Paul tĂ©moigne qu’un des meilleurs moments de son annĂ©e a Ă©tĂ© de conclure par un dĂ©bat et une mise en situation incluant le fameux PFH[1].
Le pitch : “Imaginez une réunion importante initiée par votre directrice. Cette personne, avec son habitus intimidant – voiture, vêtements, langage, posture, et accessoirement responsable de votre augmentation – vous partage la dernière innovation à mettre en place pour votre service numérique : l’ajout d’un accessoire du type Google Glass permettant à votre application web d’accéder enfin au domaine si innovant de la réalité virtuelle. Qu’en pensez-vous, mais surtout quels arguments amenez-vous lors de cette réunion ?”
A travers ces débats, les étudiant.es gagnent en confiance en leur savoir-faire et réalisent leur future plus-value en entreprises, et surtout qu’iels ont des devoirs pour aider ces dernières à innover – sans mourir.
[1] PFH : Putain de Facteur Humain
- Paul Leclercq et Antoine Gademer